Dune en 1987 (photo : Wolfgang Osterheld)

Edmond Dune, de son vrai nom Edmond Hermann, est un écrivain luxembourgeois de langue française né à Athus en Belgique en 1914, décédé à Luxembourg en 1988.

De père luxembourgeois et de mère belge, il devient orphelin en 1916 à l’âge de deux ans quand ses parents sont victimes de la tuberculose. En 1928, il perd sa sœur aînée Marie Hermann, elle aussi victime de tuberculose. Ces pertes trop précoces vont l’accompagner toute sa vie. Il poursuit sa scolarité en primaire à Differdange au Luxembourg et à Athus en Belgique, en secondaire à Arlon au collège Saint-Joseph (frères maristes). Enfin, il suit des études d’agronomie aux universités de Louvain, de Bruxelles et de Nancy.

En 1935, il opte pour la nationalité luxembourgeoise de son père, peut-être pour se soustraire à l’obligation militaire belge. Cependant, l’enrôlement militaire le rattrape : à la suite d’une crise spirituelle (en 1937, il fait une retraite au monastère Notre-Dame-de-la-Trappe à Soligny) ou d’une déception amoureuse, il s’engage dans la Légion étrangère de 1938 à 1943 (1er régiment étranger d’infanterie en juin 1939, puis 3e régiment étranger d’infanterie à partir d’août 1939), en se déclarant de nationalité belge avec le nom d’emprunt de Hugues Dardenne. Blessé le 9 mars 1943 près de Bir Halima, il reçoit la croix de guerre 1939-1945 avec citation à l’ordre du régiment. À la fin de son contrat en 1943, il rejoint jusqu’en 1945 les rangs de la Luxembourg Battery au sein de la brigade belge dite brigade Piron, elle-même intégrée dans les forces britanniques. Ainsi, il participe aux campagnes de libération de Normandie, de Belgique et de Hollande. À la fin de la guerre, Edmond Dune se fixe à Luxembourg. Il entre comme journaliste à Radio-Luxembourg (plus tard RTL) jusqu’à sa retraite en 1979. Pour RTL, il sera notamment l’auteur des scénarios de plusieurs films documentaires, portraits de villes ou de contrées, dont Differdange, ma petite ville de Jacques-Gérard Cornu en 1957 ou Echternach, haut lieu de l’esprit de Michel Drach en 1958 (en dépôt au Centre national de l’audiovisuel, fonds RTL).

En 1947, il épouse la Luxembourgeoise Margot Gengler avec laquelle il aura quatre filles.

L’écriture sera le fil conducteur de la vie d’Edmond Dune. C’est par la poésie qu’il y entre : son premier recueil de poèmes, Révélations, paraît en 1938 aux éditions Le Goéland. Il est suivi de près d’une quinzaine de recueils, l’auteur navigant entre poèmes en vers et poèmes en prose. Ces derniers sont regroupés dans Brouillard en 1956 aux éditions Caractères à Paris, le livre de sa maturité poétique, d’après Jean Portante. Dans le recueil L’Anneau de Moebius, paru en 1973, la prose s’allie au vers et même à l’essai. La composition du manuscrit Introduction à la poésie expérimentale au début des années 1970, resté inédit de son vivant, est qualifié de « poésie ouverte » par l’auteur lui-même. Au début des années 1970, il prépare deux anthologies de bilan, la sélection de Poèmes en prose (Naaman, Sherbrooke) en 1973, suivie d’une sélection de poèmes, Des rives de l’aube au rivage du soir (Institut grand-ducal, Luxembourg) en 1974.

Dans le cadre de la publication de ses œuvres impulsée par l’association Les Amis d’Edmond Dune à partir de 2009 paraît en 2011 le tome 1, Poésie, de ses œuvres, préfacé par l’écrivain Jean Portante, en collaboration avec le Centre national de littérature et les éditions Phi du Luxembourg.

Le théâtre est l’autre facette de l’œuvre de Dune dès les années 1940. Ses trois œuvres majeures (en quatre actes) ont en commun le thème de la guerre et de l’enfermement. Elles ont toutes été créées : Les Taupes en 1957 à Paris au Théâtre du Vieux-Colombier par la troupe de Marcel Lupovici, avec un accueil favorable de la presse parisienne ; Les Tigres en 1966 au Centre grand-ducal d’art dramatique de Luxembourg par Tun Deutsch ; Le Puits de Fuentes en 1974 au Théâtre municipal d’Esch-sur-Alzette par Philippe Noesen. Au début des années 1980 sortent en deux tomes la majorité de ses pièces : Théâtre I (pièces en un acte) en 1982 et Théâtre II (pièces en quatre actes) en 1983. Après le décès de l’auteur en 1988, plusieurs pièces connaissent les feux de la rampe. En 1993, à l’occasion du cinquième anniversaire du décès de Dune, le Théâtre des Capucins à Luxembourg-ville crée L’Aumônière (mise en scène de Philippe Noesen), Le Dernier Roi (mise en scène de Marc Olinger) et Gloire à Rudois (mise en scène de Alain-Jean Miche). En 2011, à Moscou, la troupe théâtrale de l’université Lomonossov représente des extraits de trois pièces en un acte (Coups de théâtre, Un rêve, L’Aumônière) ; en 2013 et en 2014, à Athus (B), la pièce Gloire à Rudois est jouée par les élèves de l’Athénée royal d’Athus à l’initiative de Paul Mathieu.

En 2018 paraît le tome 2, Théâtre, de ses œuvres, préfacé par l’universitaire Frank Wilhelm (en collaboration avec le Centre national de littérature et les éditions Phi du Luxembourg).

En 2018, le Fonds culturel national lance la bourse Edmond Dune, bourse d’aide à l’écriture théâtrale : elle est attribuée à Marie Jung, puis en 2019 à Claire Wagener en collaboration avec Frédérique Colling et Catherine Elsen, et en 2020 à Guy Helminger.

Dune en 1986 (photo : Wolfgang Osterheld)

Auteur d’aphorismes dès les années 1940 et tout au long de sa vie, Dune a regroupé ces textes concis dans trois recueils : Aphorismes (Vodaine, Basse-Yutz, 1951), Remarques (Vodaine, Basse-Yutz, 1971) et À l’enseigne de Momus (RTL Édition, Luxembourg, 1984). Ses textes en prose, parus en revues, sont regroupés dans un recueil posthume intitulé Patchwork (éditions Phi, Luxembourg,1989).

En 2022 paraît le tome 3, Prose, de ses œuvres, préfacé par la chercheuse du Centre national de littérature Myriam Sunnen (en collaboration avec le Centre national de littérature et les éditions Phi du Luxembourg).

L’écriture des autres écrivains et philosophes sera l’autre fil conducteur de la vie d’Edmond Dune, lecteur éclectique. Ainsi, il s’est adonné à la traduction de textes allemands, dont des poèmes en prose de Georg Trakl (Dire n° 6, éditeur Vodaine, 1968), de textes italiens, dont le recueil Poètes italiens d’aujourd’hui (édition bilingue, Armand Pfeiffer, Luxembourg, 1965) et de textes anglais.

Essayiste, il a été l’auteur de nombreuses analyses littéraires dans la revue Critique (consacrées à Wolfgang Borchert, Joseph Roth, Georg Büchner, Paul Léautaud, Anton Tchékhov, Wallace Stevens…) et au-delà du champ littéraire d’essais consacrés à la psychologie, la caractériologie et la graphologie. Ces textes sont regroupés dans le tome 3, Prose, de ses œuvres, paru en 2022.

Dune a collaboré à de nombreuses revues, littéraires ou non, au Luxembourg et à l’étranger (le Tageblatt, Les Cahiers luxembourgeoisLa Part du feu, L’Avant-poste, Septembre, Le Journal des poètes, Simoun, Critique…). Avec le poète et typographe Jean Vodaine, il anime successivement les revues Le Courrier de la poésie (1951), La Tour aux puces (1958) et enfin Dire (1962) ; avec le poète Franco Prete, il lance la revue franco-italienne de poésie Origine (1966).

Dès les années 1950, il s’est aussi adonné à la peinture (peinture à l’huile, pastels, gouaches) et a exposé à plusieurs reprises au Luxembourg.

Sa longue et fructueuse correspondance avec un grand nombre d’acteurs des vies littéraires luxembourgeoise, belge et française (Robert Als, Alphonse Arend, José Ensch, Jean Kieffer, Roger Linster, Paul Palgen, Franz Hellens, Arthur Praillet, Marcel Bénabou, Claude Benady, Théophile Briant, Gaston Criel, Jean Follain, Gaston Gallimard, Pierre Garnier, René Ménard, Jean Piel, Robert Sabatier, Jean Vodaine, Éric Weil…) est publiée en 2021 dans le tome 4, Correspondance, de ses œuvres, préfacé par la chercheuse du Centre national de littérature Myriam Sunnen (en collaboration avec le Centre national de littérature et les éditions Phi du Luxembourg).

Plusieurs prix littéraires ont été attribués à Edmond Dune, cet écrivain solitaire et peu rompu aux conciliabules et aux mondanités littéraires : le Prix national de littérature française à Luxembourg en 1957, le prix France-Luxembourg pour l’ensemble de son œuvre en 1979, le prix Batty-Weber, prix national de la littérature luxembourgeoise – dont il est le premier lauréat – en 1987.

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